Alfred Defuisseaux ( 1843 - 1901 )
- Centre culturel de Colfontaine

- 12 sept.
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Alfred Defuisseaux est né à Mons le 9 décembre 1843 dans une famille bourgeoise qui comptait 6 enfants.
Docteur en droit à l’ULB en 1868, ténor du barreau de Mons dès 1872, il se spécialisa dans la défense des ouvriers victimes d’accidents de la mine et devint, de ce fait, la bête noire des patrons charbonniers qui obtinrent sa condamnation pour subordination de témoin en 1875. L’avocat borain s’exila pour ne pas devoir purger sa peine.
Rentré en Belgique en novembre 1885 et installé à Attre, Alfred Defuisseaux, qui rêve de république sociale, s’engage résolument dans la vaste campagne en faveur du suffrage universel que le tout nouveau Parti Ouvrier Belge (P.O.B.) vient de lancer : il décide d’organiser en juin 1886 une manifestation nationale à Bruxelles pour réclamer l’égalité politique. Cette même année, des événements graves se précipitent : révoltes et manifestations se succèdent dans le pays. Le gouvernement répond par la violence : Seraing, Jemeppe, Roux, Quaregnon, Carnières, Monceau, Verviers sont le terrain de rencontres sanglantes.
Alfred Defuisseaux, attaché aux révolutions de 1789 et de 1848, est intimement convaincu que seule la peur provoquée par des remous sociaux majeurs poussera les classes dirigeantes à renoncer au vote censitaire, leur privilège électoral. Il écrit « Le catéchisme du peuple», qui allait changer sa vie : devenu un héros populaire, il fut jugé dangereux par le pouvoir en place. En juin 1886, Defuisseaux est poursuivi devant la Cour d’Assises du Brabant pour son Catéchisme. Il s’enfuit pendant le procès et passe en Hollande et de là, en France. Il s’installe dans un premier temps à Raincy, en banlieue parisienne, dans une maison ayant accueilli des tuberculeux : plusieurs de ses enfants, contaminés, trouvèrent la mort. Lui-même contracta la terrible maladie, qui lui valut une mort prématurée en 1901. Par le biais de ses journaux, il continua son combat aux côtés du P.O.B., qui, effrayé par son obstination contagieuse d’action directe par la grève générale, l’exclura en février 1887. Après son exclusion du POB, il devint directeur politique d’un Parti républicain socialiste belge (PSRB). Il sera inquiété dans le cadre du « Procès du grand complot » en 1889.
Après sa libération, Defuisseaux recentre son action politique sur le Borinage. En 1895, il est élu député. Accélérateur de l’histoire, il aura largement contribué à l’avènement du suffrage universel.
Procès du grandcomplot
Le gouvernement va user de moyens dignes des plus fantastiques romans d’espionnage. Méthodes d’oppression militaire, de conspiration, … Des informateurs, payés royalement par la « sureté publique », organisme qui vivait de subsides secrets dont disposait le Ministre de la justice, allait inventer de toutes pièces « le grand complot » contre l’État. Ce complot n’existait que pour pouvoir se débarrasser de Defuisseaux et des meilleurs militants borains. Il se termina par un procès à la Cour d’assises de Mons du 6 au 25 mai 1889 : débat passionnés et tumultueux, le peuple borain entier venait défendre son chef et les 27 autres accusés, 19 avocats, 98 témoins… Les révélations, et notamment celles de l’administrateur de la sûreté publique, sont accablantes : ce ne sont pas les ouvriers qui complotent contre la sécurité de l’État mais bien la Sureté publique et le gouvernement qui ont comploté contre la démocratie….
Le catéchisme du peuple
Le catéchisme du peuple est rédigé par Alfred Defuisseaux à la demande du POB, désireux d’inciter les ouvriers à participer à une manifestation en faveur du suffrage universel, qui aurait dû se tenir à Bruxelles le 13 juin 1886. Le Catéchisme résume les grandes lignes de cette doctrine. Il inspire et même souffle les réponses à une série de questions, comme autant de condamnations du régime : toutes les inégalités proviennent de l’inégalité du droit de vote (« suffrage censitaire »). Pour le travailleur, les formules incisives deviennent de véritables mots d’ordre.
Defuisseaux vante les mérites du suffrage universel, « arme pacifique permettant de réaliser les réformes indispensables au règne de la justice et de l’ordre du pays » et qui, accordé à l’ouvrier, écarterait à jamais l’ère des revendications violentes. 170.000 exemplaires vendus en Wallonie, 60.000 en Flandre. Le succès est foudroyant. Les autorités attribuent à Defuisseaux la responsabilité du « printemps sanglant », des émeutes violentes. Le 4 juin, Defuisseaux est condamné à 6 mois de prison.
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